pour beaucoup dans la sphère culturelle francophone – au-delà des curieux et des aficionados de la première heure – la découverte du slam est liée à la médiatisation (radios, télévisions, « victoires de la musique », grandes salles de concerts…) de « midi 20 », le premier album de grand corps malade en 2006. même si sa longue silhouette dégingandée apparaît après à peine quelques dizaines de secondes de ce documentaire consacré au slam, jamais sa présence n’écrase ou ne cache ici qui que ce soit parmi ses amis slameurs moins médiatisés. l’intérêt du document est d’aller mettre les mains dans le terreau où s’enracine le baobab grand corps malade : ces petites scènes ouvertes où tout le monde est encouragé à passer, au cours d’une même soirée, du statut de paire d’oreilles à celui de plume et de porte-voix. ceux qui prennent le slam de haut, qui n’y voient qu’effet de mode, reviendront nous voir le jour où les scènes des musiques que ces mauvais esprits écoutent auront réalisé la moitié de l’utopie de mixité sociale que ces petites scènes slam ont déjà réussi à concrétiser. une fois encore – il faudra encore le répéter souvent – ce document prouve que la culture, lorsque qu’on la définit par une conception vivante et innovante des formes d’expression et non comme un chapelet de gris-gris du bon goût, n’est pas l’apanage des classes aisées et que les quartiers « à karchériser » de nos sociétés peuvent trouver des mots aussi acérés qu’évocateurs (c’est-à-dire poétiques) pour reconquérir la dignité qu’à coup de slogans racoleurs des sinistres personnages démagogues essayent de leur arracher.
notre hésitation de départ à appréhender « slam, ce qui nous brûle », soit comme un « vrai » film de cinéma documentaire, soit plutôt comme un reportage de télévision, se vide rapidement de tout sens. si son réalisateur a clairement eu à se faire violence pour faire rentrer au chausse-pied une matière foisonnante dans le canevas étriqué de la fenêtre standard du petit écran (52 minutes), le résultat relève de la télévision telle qu’on la rêve: pédagogique sans être coincée ou rigide et, surtout, abordant une culture urbaine des marges de la république – et les hommes et les femmes qui y vivent et s’y expriment – sans voyeurisme ni condescendance, sans « faits-diversification » ni clichés racoleurs, de l’intérieur plutôt que comme un émoustillant safari sociologique…
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suite de mon article sur le site de la médiathèque…
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